CARDIOVASCULAR JOURNAL OF AFRICA • Volume 26, No 4, July/August 2015
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AFRICA
Resumé
La prise en charge des cardiopathies infantiles congénitales
ou acquises dans les pays d’Afrique au sud du Sahara posent
encore d’énormes difficultés de diagnostic et d’accès au
traitement notamment chirurgical. Les objectifs de ce travail
rétrospectif étaient de déterminer la prévalence des cardiopa-
thies observées en milieu pédiatrique au Centre Hospitalier
Régional (CHR) de Louga, de décrire les différents types
observés et de rapporter leur évolution à court terme.
Durant la période d’étude, 1 Juillet 2009 au 31 Décembre
2012, 82 enfants sur 18 815 enfants présentaient une cardiop-
athie, soit une prévalence de 4.3/1 000. On note une prédomi-
nance du sexe féminin avec un sexe ratio de 1.2. Les circon-
stances de découverte les plus fréquentes sont représentées
par la dyspnée 47.5% suivie du souffle cardiaque 35.3% et de
l’insuffisance cardiaque congestive 13.4%. Les cardiopathies
congénitales sont les plus fréquentes avec 69.5% des cas suivi
des cardiopathies acquises avec 29.3% des cas et des formes
mixtes avec 1.2%. Les principales cardiopathies congénitales
retrouvées sont la communication inter ventriculaire (24.3%)
suivie des canaux atrio-ventriculaires (12.1%), de la tétralogie
de Fallot (9.7%) et de la persistance du canal artériel (7.3%).
Les cardiopathies rhumatismales retrouvées dans 25.6%
des cas et les péricardites tuberculeuses dans 3.7% des cas
représentent les formes acquises. La mortalité est élevée avec
20 enfants décédés (24.4%) pendant la période d’étude. Seuls
13 patients sur 82 (15.9%) présentant une indication opéra-
toire ont été opérés en France grâce à une prise en charge par
l’association humanitaire Mécénat Chirurgie Cardiaque.
Ainsi donc les cardiopathies infantiles sont peu fréquentes
dans le service de pédiatrie du CHR de Louga. Les formes
congénitales sont plus fréquentes que les formes acquises.
Leur mortalité est élevée et l’accès à la chirurgie reste faible.
Mots clés:
cardiopathie congénitale, cardiopathies acquises, chir-
urgie cardiaque, association humanitaire, Afrique
Submitted 8/5/14, accepted 16/3/15
Cardiovasc J Afr
2015;
26
: e1–e5
www.cvja.co.zaDOI: 10.5830/CVJA-2015-031
La prévalence des cardiopathies infantiles en Afrique
sub-Saharienne est estimée à environ 8 pour mille naissances
vivantes pour les cardiopathies congénitales et au moins 1 à 14
pour mille pour les cardiopathies rhumatismales.
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La prise en
charge de ces cardiopathies infantiles dans les pays d’Afrique
au sud du Sahara et au Sénégal en particulier posent encore
d’énormes difficultés de diagnostic et d’accès au traitement
notamment chirurgical contribuant ainsi à une augmentation
de la mortalité et de la morbidité infantile.
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Les objectifs de
ce travail étaient de déterminer la prévalence des cardiopathies
observées en milieu pédiatrique au Centre Hospitalier Régional
(CHR) de Louga, de décrire les différents types observés et de
rapporter leur évolution à court terme.
Methodes
La présente étude est réalisée à Louga situé à environ 200 km
au nord de la capitale, dans le service de pédiatrie du Centre
Hospitalier Régional (CHR). Ce centre est un hôpital de
référence au niveau régional situé en zone semi désertique, avec
des ressources humaines et matérielles très limitées polarisant
une population estimée à environ 960 621 habitants en 2012.
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Il
s’agit d’une étude rétrospective portant sur les enfants de 0–17
ans vus en consultation externe ou hospitalisés dans le service de
pédiatrie du CHR de Louga du 1 Juillet 2009 au 31 Décembre
2012.
La consultation externe est effectuée par un pédiatre ou par
un infirmier. Cependant tous les cas suspects de cardiopathies
vus par l’infirmier sont examinés ultérieurement par le pédiatre
et bénéficiaient ainsi d’un examen clinique complet. Les patients
hospitalisés sont tous vus par le pédiatre. Une cardiopathie était
suspectée devant les symptômes d’appel suivants: la cyanose,
la bronchite à répétition, un souffle cardiaque de caractère
organique, une insuffisance cardiaque, une cardiomégalie à la
radiographie du thorax. Les données des consultations externes
étaient recherchées à partir des registres de consultation et
celles des malades hospitalisés à partir des dossiers patients. Les
doublons étant recherchés à partir de l’âge, du sexe, du lieu de
résidence et du type de cardiopathie et supprimés.
Une échographie cardiaque n’était prescrite qu’aux enfants
présentant ces signes évocateurs d’une cardiopathie (Fig.
1). L’examen d’échographie cardiaque était effectué par un
cardiologue sur un appareil HP SONOS 100 munie d’une sonde
phased array de 2–4 MHz de fréquence et des modes Doppler
pulsé, continue et couleur.
Le diagnostic de cardiopathie n’était retenu qu’après
confirmation à l’échocardiographie. Les autres paramètres
suivants ont été analysés: l’âge, le sexe, la notion de consanguinité,
le niveau socio-économique, les circonstances de découverte, le
type de cardiopathie acquise ou congénitale, le type de traitement
médical ou chirurgical et les modalités évolutives.
Tous les parents d’enfants présentant une cardiopathie étaient
informés du diagnostic et ceux ayant nécessités d’une prise en
charge chirurgicale avaient donnés leur consentement préalable.
Les données recueillies ont été traitées et analysés par le
logiciel Epi Info version 3.5.4.
Resultats
Quatre-vingt-dix enfants sur les 18 815 vus durant la période
d’étude présentaient des signes évocateurs d’une cardiopathie.
Cinquante ont été recensé en consultation externe et 40 en
hospitalisation. Ils ont tous bénéficié d’une prescription d’une
échographie cardiaque, mais seuls 87 ont bénéficié de cette
exploration, les parents de trois enfants ne se sont pas présenté.
Cinq échographies étaient normales et 82 cardiopathies ont été
confirmées soit une prévalence de 4.3/1 000.
L’âge moyen de découverte des cardiopathies congénitales est
8 ans 6 mois (extrêmes 1 mois et 15 ans) et celui des cardiopathies
rhumatismaux 9 ans 5 mois (extrêmes 4ans et 15 ans). On note
une prédominance du sexe féminin avec un sexe ratio de 1.2.
Le niveau socio-économique des parents est estimé moyen
dans 62.2% des cas et plus de la moitié des patients (52.4%)
provenaient d’un milieu urbain. Les mariages consanguins sont
retrouvés chez presque tous les parents des patients (92.7%).
Les circonstances de découverte les plus fréquentes sont la
dyspnée (47.5%), le souffle cardiaque (35.3%), l’insuffisance
cardiaque congestive (13.4%) et la cyanose (9.7%) (Fig. 2).