CARDIOVASCULAR JOURNAL OF AFRICA • Volume 29, No 1, January/February 2018
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AFRICA
de mort subite) et des troubles de la conduction au Holter ECG
(alternance BAV II type I et type II). Un patient de 27 ans qui
avait un gradient maximal intra-VG
>
50 mmHg aux efforts
minimes et une mauvaise adaptation de la TA à l’effort (risque
intermédiaire) a été proposé à la myectomie.
Discussion
La MS constitue la hantise au cours de la CMH. Les principaux
facteurs de risque de MS reconnus sont:
1,8,9
•
âge jeune au moment du diagnostic (moins de 30 ans)
•
histoire familiale de CMH avec mort subite prématurée
•
syncopes répétées (à l’effort ou inexpliquée)
•
réponse anormale de la pression artérielle à l’effort (différence
pression artérielle au maximum de l’effort et pression artéri-
elle (PA) de repos
<
20–25 mmHg, surtout avant 40 ans)
•
tachycardie ventriculaire (TV) non soutenue (surtout si répé-
tée ou prolongée)
•
arrêt cardiaque récupéré
•
TV soutenue
•
hypertrophie importante (paroi
≥
30 mm)
•
mutation maligne (celles du gène troponine T, R403Q du gène
MYH7).
Dans notre étude, nous avions retrouvé une prédominance
masculine avec 68% d’hommes. Niamkey à Abidjan
10
retrouvait
une prédominance masculine à 66.7% dans une étude ayant
porté sur l’identification des facteurs majeurs de MS parmi les
patients (au nombre de six) suivis pour CMH. L’âge moyen
de nos patients était de 53.2 ans avec des extrêmes de 27 et 79
ans. Niamkey
10
retrouvait un âge moyen de 30.5 ans avec des
extrêmes de cinq et 45 ans. Maron
11
retrouvait un âge moyen
de 34 ans dans une étude en 1981. La différence d’âge de notre
étude et celles des deux auteurs est due au choix des âges de leurs
échantillons.
Trois patients présentaient des troubles du rythme ventriculaire
au Holter ECG, dont un cas d’hyperexcitabilité ventriculaire
degré V de Lown. Une patiente présentait des troubles de la
conduction à type d’alternance de BAV de 2ème degré Mobitz
I et Mobitz II sur fond de nombreux épisodes de bradycardie.
Le plus jeune de nos patients (27 ans) a présenté une mauvaise
adaptation des chiffres tensionnels à l’effort. Cette désadaptation
tensionnelle à l’effort, les troubles du rythme ventriculaire et de
la conduction sont des facteurs qui font la gravité de la maladie.
Ils sont à rechercher lors de l’évaluation initiale du patient à
la recherche de facteurs pouvant favoriser la survenue de MS.
Charron
12
retrouvait une hyperexcitabilité supraventriculaire et
notait aussi une TV non soutenue chez 25% des patients adultes,
les TV soutenues étant rares. Il faisait ressortir la réponse
anormale de la PA à l’effort, surtout avant 50 ans comme un
facteur de risque de survenue de mort subite. Toutefois, un seul
des facteurs de risque majeurs n’a que peu de valeur prédictive
positive (environ 15–20%). C’est l’association de plusieurs d’entre
eux qui doit être considérée.
12,13
Concernant le risque de MS, Niamkey
10
retrouvait 33.3% de
haut risque de décès et un risque intermédiaire chez les autres
patients. Maron et Mckenna
14,15
notaient un taux de MS évalué
entre 2 à 3% par an chez les adultes et entre 4 à 6% par an chez les
enfants. Toutefois, ces travaux présentaient des biais de sélection
importants. Cannan, Cecchi et Kofflard
16-18
dans des études plus
récentes réalisées dans des populations moins sélectionnées ont
retrouvé des taux de MS bien inférieurs. Ils étaient de l’ordre de 1
à 2% par an, et même moins pour certaines études, indiquant que
le pronostic des CMH est bien meilleur que celui communément
admis.
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Il est à noter que ces travaux ont évalué l’évolution et le
pronostic de la maladie tandis que notre étude a évalué le risque
de survenue de MS dans les cinq ans en utilisant le calculateur
en ligne de l’ESC. Ce dernier permet de détecter les patients à
même d’être proposés à l’implantation d’un DAI. Ce calculateur
présente toutefois certaines limites:
20
il n’est pas utilisable chez
le patient de moins de 16 ans, l’athlète de compétition d’élite, le
sujet ayant subi une alcoolisation septale ou une myectomie, de
même que lorsque l’hypertrophie septale maximale est
≥
35 mm.
En plus, il n’intègre pas les données concernant le test d’effort.
C’est d’ailleurs ce qui explique qu’un de nos patients qui avait
une désadaptation tensionnelle à l’effort (facteur de risque
majeur) a eu un risque quotté intermédiaire.
La prise en charge intégrait, en plus des règles d’hygiène de vie
et de proscription de sport de compétition, le traitement médical
à base de bétabloquant et d’inhibiteur calcique bradycardisant
(chez 13 patients). La patiente à haut risque de survenue de
MS et qui présentait le trouble de la conduction avait bénéficié
d’un DAI avec fonction pace maker. Elle est en instance de
traitement complémentaire à type d’alcoolisation septale voire
de myectomie vu la persistance de sa symptomatologie et du
gradient intra-VG.
La prise en charge de la CMH fait appel à deux grandes
catégories de traitement: celui médicamenteux et celui non
médicamenteux.
21
Le traitement médical est de première intention
et fait appel classiquement aux bétabloquants, vérapamil et
disopyramide (réservé aux cas résistants aux deux premiers
chez les patients avec obstruction).
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Les autres molécules sont
administrées en fonction du tableau clinique du patient avec une
prudence accrue pour l’utilisation des diurétiques.
Le traitement non médicamenteux est réservé aux patients
ayant un gradient intra-VG résistant au traitement médical et aux
patients restant symptomatiques malgré un traitement optimal.
Il s’agit de la myotomie-myectomie de Marrow, de l’alcoolisation
septale, de la stimulation double chambre et du DAI avec ou sans
fonction pacemaker. Selon les recommandations, la prévention
nécessite une évaluation du risque de MS. Ainsi, un DAI devrait
être implanté à tout patient à haut risque de MS.
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Conclusion
L’évaluation du risque de survenue d’une cardiomyopathie
hypertrophique est une étape cruciale permettant d’avoir un
traitement adéquat. Notre travail portant sur l’évaluation du
risque de mort subite dans la cardiomyopathie hypertrophique
à Dakar a trouvé une prédominance de risque faible et
intermédiaire de mort subite à cinq ans. Le haut risque n’existait
que dans 1 cas. L’évaluation de ce score a par ailleurs, permis de
proposer une prise en charge adéquate chez nos patients.
Références
1.
Richard P, Charron P, Carrier L, Ledeuil C, Cheav T, Pichereau C,
et
al
. Hypertrophic cardiomyopathy: distribution of disease genes, spec-
trum of mutations, and implications for a molecular diagnosis strategy.
Circulation
2003;
107
: 2227–2232.