CARDIOVASCULAR JOURNAL OF AFRICA • Vol 23, No 1, February 2012
e2
AFRICA
Conclusion
: La prévalence d’une PP
>
60 mmHg était élevée
chez l’hypertendu noir Africain. Son contrôle était médiocre
mais la bithérapie comportant un diurétique a été plus effi-
cace. Ses conséquences myocardiques étaient significatives.
L’hypertension artérielle est un facteur de risque cardiovascu-
laire majeur. Pendant de longues décennies, seul les pressions
artérielles diastolique et systolique ont été les paramètres pris en
compte dans l’évaluation du risque cardio-vasculaire.
1,2
Mais ces
dernières années ont été incontestablement celles de la révolu-
tion dans l’estimation du risque cardiovasculaire par l’abondance
des preuves épidémiologiques sur le rôle pathogène de la pres-
sion pulsée. La pression pulsée ou pression différentielle est
considéré comme un facteur indépendant du risque cardiovas-
culaire.
3,4
Néanmoins la plupart des études retrouvées dans la
littérature font allusion au rôle délétère de la pression pulsée,
mais traitent très peu de facteurs épidémiologiques spécifiques
de celle ci. En Afrique subsaharienne, très peu d’études ont été
consacrés à cette dernière. C’est devant ces controverses mais
surtout devant l’insuffisance de données épidémiologiques sur la
pression pulsée en Afrique subsaharienne, que nous avons initié
cette étude. Elle avait pour but de décrire la pression pulsée chez
l’hypertendu noir africain.
Methodologie
Il s’agit d’une étude rétrospective à visée descriptive et analyt-
ique ayant porté sur les dossiers des patients reçus en consultation
externe de l’Institut de Cardiologie d’Abidjan de 1997 à 2007
pour hypertension artérielle. Les dossiers retenus au nombre de
640 étaient ceux des patients non traités avant l’inclusion, ayant
effectué au moins 5 consultations et comportant des données
électrocardiographiques et échocardiographiques.
Les patients exclus étaient les femmes enceintes, les moins
de 15 ans et les patients ayant eu moins de 5 consultations et
moins de 12 mois de suivi. Le critère principal étudié était la
pression pulsée à savoir sa prévalence, les facteurs de son éléva-
tion, ses retentissements sur les organes cibles et ses variations
sous traitement durant le suivi. Les critères secondaires étaient
les critères socio-démographiques (âge, sexe) et les facteurs de
risque cardiovasculaires.
Ces critères ont été évalués durant une période de 12 mois au
cours de 5 consultations consécutives: à l’inclusion, au 1er mois,
à 3, 6 et 12 mois. La pression pulsée était considérée comme
élevée lorsqu’elle était supérieure à 60 mmHg.
L’analyse statistique des données s’est faite à l’aide du
logiciel SPSS 10.1. La comparaison des moyennes a été effec-
tuée grâce au test du Khi
2
au seuil de 5%. Pour les effectifs infé-
rieurs à cinq, nous avons utilisé le test de Fischer au seuil de 5%.
Resultat
L’âge moyen était de 56.2
±
12.8 ans avec des extrêmes de 17 et
89 ans. Nous avons observé une prédominance féminine (56%)
avec un sexe ratio de 1.26 en faveur des femmes.
La grande majorité de nos patients (67%) ont présenté une
hypertension artérielle simple sans facteurs de risques cardio-
vasculaires. Trente trois pour cent avaient au moins un facteur de
risque cardio-vasculaire. Vingt trois pour cent avaient un facteur
de risque cardio-vasculaire, 7.5% en avaient deux et 2.3% en
avaient trois ou plus.
Nous avons observé une prédominance du diabète et de
l’intoxication tabagique dans respectivement 13.4% et 12.5%
des cas. L’obésité et les dyslipidémies ont été très peu observées.
Parmi les 640 patients qui ont fait l’objet de notre étude,
384 avaient une pression pulsée élevée (PP
>
60 mmHg) à
l’inclusion, soit une prévalence de 60%. Cette prévalence a
connu une décroissance durant le suivi avec successivement
42.2, 43.4, 41.7 et 42.2% lors de la 5ème consultation. Le taux
de normalisation de la pression pulsée (PP < 60 mmHg) de
l’inclusion à la 5ème consultation était de 17.8%.
A l’inclusion la pression pulsée était significativement plus
élevée chez les patients âgés de plus de 50 ans (69.6 vs 30.3%;
p
<
0.001). Cette population de plus de 50 ans a représenté 45%
de notre population d’étude. De même la pression pulsée a été
significativement plus élevée chez les patients de sexe féminin
par rapport au genre masculin (60 vs 40%,
p
=
0.02) (Tableau 1).
Dans notre série 86 patients étaient diabétiques. Parmi eux
76.7% avaient une pression pulsée élevée contre 23.3% de pres-
sion pulsée normale. La différence était statistiquement signifi-
cative (
p
=
0.0006).
Nous avons observé une proportion plus importante de
tabagiques avec une pression pulsée élevée, mais la différence
n’avait pas atteint le seuil de la significativité (55 vs 45%,
p
=
TABLEAU 1. CARACTERISTIQUES DE
LA PRESSION PULSEE
Paramètres
PP élevée
n (%)
PP normale
n (%)
p
Facteurs de la PP
Age
>
50 ans
289 (69.6) 126 (30.3)
<
0.001
Sexe féminin
229 (64)
129 (40)
0.02
Diabète
66 (76.7)
20 (23.3) 0.0006
Tabac
44 (55)
36 (45)
NS
Obésité
12 (63.2)
7 (36.8)
NS
Dyslipidémie
52 (55)
43 (45)
NS
Retentissement myocardique
Insuffisance cardiaque clinique 39 (59.1)
27 (40.9)
NS
A l’électrocardiogramme
ECG anormal
266 (65.8) 138 (34.2)
0.01
HVG
132 (68.8)
60 (31.2)
0.026
HAG
38 (60.3)
25 (39.7) 0.0004
Troubles du rythme
48 (59.3)
33 (40.7)
NS
A l’échocardiographie
Echocardiographie anormale
310 (58.7) 218 (41.3)
0.04
Dilatation OG
284 (58)
208 (42)
0.016
Dilatation VG en diastole
306 (69.9) 132 (30.1)
<
0.001
Dilatation VG en systole
110 (84)
21 (16)
<
0.001
Hypertrophie SIV
230 (64.2) 128 (35.8) 0.021
Hypertrophie PP
308 (58.3) 220 (42.7)
0.05
FEVG
254 (56.8) 193 (43.2) 0.006
FR
319 (58.1) 217 (41.9)
<
0.001
Retentissement rénal
9 (39.1)
14 (60.9)
NS
Retentissement cérébral (AVC) 16 (55.2)
13 (44.8)
NS
OG
=
oreillette gauche, VG
=
ventricule gauche, HVG
=
hypertrophie
ventriculaire gauche, HAG
=
hypertrophie auriculaire gauche, SIV
=
septum interventriculaire, PP
=
paroi postérieure du ventricule
gauche, FEVG
=
fraction d’éjection du ventricule gauche, FR
=
pour-
centage de raccourcissement du ventricule gauche.